Un jour de janvier 2006, des jeunes nôtres sont devenus des antisémites français absolus jusqu'à la torture répétée et à l'assassinat d'un jeune vendeur Juif qui gagnait 1200 euros par mois. Ils n'étaient pas de bons enfants de l'immigration. Mais des enfants de l'Anomie, de la France laide, la nôtre, celle des maisons moches, de l'absence de destin, celle où à quinze ans, le dernier espoir que propose la société française, c'est éventuellement un BEP qui ne débouchera sur aucun emploi permettant de consommer correctement. Ce n'est pas une excuse, pour les nôtres, la notion d'excuses n'existe pas dans la société française. Et des millions d'entre nous ont cette vie sans destin, sans pour autant devenir de sales petites frappes violentes avec les leurs, violentes avec tout le monde. Avant l'assassinat d'Ilan Halimi, le fameux « gang des barbares » était cela. Une bande de petits salauds prêts à tout pour faire de l'argent. Réussissant bon an mal an à terroriser, braquer, faire du chantage.
En janvier 2006, l'Histoire les rattrape et ils deviennent des antisémites français. Atteints par une pathologie très hexagonale. Celle qui consiste à être intimement certain que tous les Juifs ont de l'argent, beaucoup d'argent. Et qu'ils sont une communauté extraordinairement soudée, quasi-communiste où l'argent est à tout le monde.
Dans le cerveau de Youssouf Fofana et de ses complices, capturer et séquestrer un jeune vendeur au SMIC est l'absolue garantie de devenir riche. Parce qu'il est impossible qu'Ilan Halimi soit vraiment ce qu'il semble être, un jeune homme ordinaire avec des revenus et un job ordinaire de son âge et une famille qui, sans être dans le besoin, n'a pas des millions d'euros d'avance, ni même des centaines de milliers d'euros. Schéma typique de l'antisémitisme, aucun Juif n'est réellement ce qu'il a l'air d 'être, il dissimule sa puissance. Mais ce n'est pas la seule illusion terrible qui tient les assassins d'Ilan. L'autre est celle de l'existence du complot Juif. C'est à dire d'une organisation tentaculaire et solidaire qui protège les siens. Les assassins sont persuadés que la famille d'Ilan peut contacter la « communauté » et que celle-ci donnera les centaines de milliers d'euros de la rançon. Lorsque après des jours de vaine négociation avec la famille, ils commenceront à s'impatienter, les ravisseurs du jeune homme contacteront un rabbin pour qu'il mène la négociation du côté Juif .
Et puis finalement, devant le réel, c'est à dire l'échec absolu de leur plan fondé sur la vision du monde antisémite, absolument fausse, ils finiront par devenir absolument antisémites, c'est-à-dire absolument exterminateurs. Tout en se rendant compte que la seule issue pour s'en sortir est de relâcher Ilan Halimi en espérant ne pas être retrouvés, ils s'acharneront à le torturer une énième fois, à mort avant de le jeter sur un bord de voie rapide. Perdant ainsi leur dernière chance de sauver leur propre vie. Pour nous, il importe de se souvenir de cela. L'antisémitisme n'est jamais une garantie de prospérité pour les issus de l'immigration musulmane. Seulement celle de la mort ou de la déchéance absolue, éventuellement après avoir commis l'irréparable. Seulement cela.
Entre 2006 et 2023, l'antisémitisme français a été un ascenseur social énorme...pour les Français et les chrétiens. Il a permis à des dizaines de prédicateurs politiques de construire des carrières sur le modèle des précurseurs Dieudonné et Soral mais aussi d'une myriade de jeunes néo-nazis issus des classes moyennes supérieures. A partir du milieu des années 2000, en France, l'antisémitisme mène à tout. Publier un best steller comme « Comprendre l'Empire », passer dans les émissions à la mode, comme un Marc Edouard Nabe, et le petit bonus qui va avec, être édité chez Gallimard. Devenir un Youtubeur conspirationniste rémunéré. Monter des boîtes de production, des mini-sectes, des organisations militantes et politiques, devenir organisateur de concerts néo-nazis autorisés.
La demande d'antisémitisme en France a créé ces années là, un petit Eldorado inattendu pour des gens qui n'avaient pas trouvé le moyen de réussir ailleurs. Il y a eu un antisémitisme de consommation qui permettait de faire marcher toutes sortes de commerces. Cet antisémitisme de petits entrepreneurs de la haine n'a pas été très puni, malgré les cris d'orfraie hypocrites des gouvernements successifs. Il y a aujourd'hui un député à l'Assemblée qui fut autrefois tenancier de librairie négationniste. Yann Moix, écrivain à la mode finalement démasqué comme compagnon de route des antisémites d'extrême-droite ….est toujours écrivain à la mode. Beaucoup de soraliens font aujourd'hui une jolie carrière ...de soraliens repentis à l'instar de Mathias Cardet promu par les islamophobes pour expliquer qu'en dehors des musulmans, il n'y avait avec Soral et Dieudonné que de courageux infiltrés antifascistes comme lui. Et contrairement à des dizaines de jeunes musulmans condamnés à des peines de prison, virés de leur emploi ou de leur lycée pour avoir fait une quenelle en selfie, Dieudonné, Soral et Robert Faurisson n'ont jamais mis un pied en prison.
Mais les antisémites issus de notre communauté n'ont pas eu majoritairement cet accès à un statut social valorisé. Même ceux qui auraient pu être protégés par une certaine renommée médiatique ont été soumis au régime ni oubli ni pardon. A l'instar de Mehdi Meklat, qui avait certes réellement ouvert un faux profil néo-nazi sur Twitter, mais à une époque où cependant beaucoup de polémistes et auteurs français n'hésitaient pas à répondre aux invitations du cercle Aristote, dont les conférences se tenaient au QG du néo-nazi Serge Ayoub. Ou de Mennel, jeune chanteuse en hijab , descendue en flèche et définitivement pour quelques tweets de jeunesse.
Et quelques uns des nôtres sont aussi devenus des assassins qui ont non seulement commis des crimes d'une violence absolue contre la communauté juive, mais brisé leur famille et notre communauté. A commencer par l'assassinat d'Ilan Halimi. En 2023, sur un site musulman, lui rendre hommage, c'est avant tout lancer cet avertissement aux pères et aux mères, aux grands frères et aux grandes sœurs qui ne connaissent pas son histoire et la nôtre, car le temps et les réécritures politiques ont déjà fait oublier le réel. Attention, les jeunes nôtres peuvent devenir des antisémites français, tuer et en mourir. Rendre hommage à Ilan est avant tout et peut-être seulement cela, justement parce que la réécriture du réel ne nous permet pas autre chose.
Nous ne sommes pas autorisés à être solidaires des victimes d'antisémitisme, pas autorisés à compatir, pas autorisés à analyser, pas autorisés à être le camp du Bien, à poster chaque année une photo d'Ilan Halimi sur les réseaux à date fixe, à ne faire que cela contre l'antisémitisme et en retirer l'approbation de nos contacts. Nous ne sommes pas des gens bien, nous sommes les nouveaux antisémites. Nous avons tué Ilan Halimi, nous avons commis tous les crimes antisémites ensuite, collectivement, juste en existant. Nos hommages seraient accueillis d'un « Comment osez-vous ? » ou au mieux d'une accusation de taqya. Quant à nos analyses sur l'antisémitisme, nous ne sommes que des arabes, de quel droit ?
Aussi bien, parce que les faits sont têtus, autant simplement se préoccuper de nous et des nôtres, l'universalisme dans le vide est inutile. Et nous avons besoin de nous rappeler ce qui s'est passé, de déconstruire le récit du « nouvel antisémitisme » pour notre avenir communautaire. Ce récit trouve sa trame et sa force avec le moment Ilan Halimi. Un récit ne fonctionne socialement que s'il est une coproduction de forces politiques et de locuteurs autorisés dans le débat public venant de différentes sphères, antagonistes au moins en apparence.
C'est ce qui va se passer en janvier 2006 et dans les mois qui vont suivre. D'un côté, la sphère islamophobe. Et par exemple Pierre-André Taguieff, le plus synthétique d'entre eux. Dans une tribune au Figaro, il résume parfaitement les récits qui vont se construire. Il faut que Youssouf Fofana et les siens soient des « islamistes ». Dans un dossier d'une extrême complexité puisqu'il implique une vingtaine de personnes minimum, d'origines et de religion ou de non-religiosité différentes et notamment des français de souche, Taguieff extirpe ce qui l'arrange. Un fait : des prospectus du « Comité de secours et de bienfaisance et de secours aux Palestiniens», ont été retrouvés au domicile d'un des protagonistes de l'affaire. Taguieff ne dit pas lequel. Et c'est à dessein qu'on emploie ici le mot prospectus. Car au début des années 2000, sur tous les marchés des quartiers populaires, on récolte forcément ce genre de papiers appelant à donner de l'argent pour les Palestiniens. Il n'y a pas internet et le tractage sur les marchés est toujours massif. On le met dans sa poche, on le pose à la maison, avec la pub pour des matelas à prix cassés. Poser comme fait signifiant cette « trouvaille » dans un HLM de Bagneux est à peu près aussi crédible en soi que si cela avait été un tract du PCF ou du Front National. Cela ne signifie rien, mis à part, éventuellement un soutien populaire massif à la cause palestinienne, qu'on peut partager en ayant par ailleurs les opinions les plus différentes du monde sur tous les sujets.
Taguieff ajoute donc un mot magique qui fera florès ensuite, car il exonère de tout développement, de toute précision. « et de la propagande SALAFISTE ». Islamiste est trop faible et un lecteur un peu curieux pourrait demander quoi exactement ? « Salafiste », il n'y a plus rien à demander, tant déjà à cette époque, le mot est synonyme dans l'imaginaire français d'illégal et de terroriste. Il suffit à tracer une filiation entre le « gang des barbares » et l'ensemble des jeunes musulmans de France. Et peu importent toutes les autres filiations possibles. Par exemple, les médias font aussi état au même moment de la découverte de propagande « néo-nazie » chez l'un des protagonistes. La propagande néo-nazie en 2006 n'est pas distribuée sur les marchés des quartiers populaires comme le sont les tracts des organisations qui demandent de la solidarité financière, notamment pour reconstruire des écoles, des hôpitaux ou des mosquées à Gaza. Pour en avoir à la maison, il faut l'avoir cherchée un minimum. Mais ce fait-là reste un simple fait, que les locuteurs du nouvel antisémitisme ont le pouvoir de rendre absolument insignifiant. On n'en saura donc jamais plus, même dix sept ans après. Peu importe, d'ailleurs. Les croyances antisémites banales des assassins d'Ilan Halimi sont parfaitement établies, nul besoin d'aller chercher la main de militants politiques derrière. Néo-nazis ou salafistes. Mais la main salafiste correspond à un récit politique qui monte en puissance dans ces années-là, celui du racisme et de l'islamophobie. Il prend donc et notamment parce que la gauche qui veut le combattre va l'alimenter, en considérant Youssouf Fofana et les autres protagonistes de l'affaire Ilan Halimi comme représentatifs de notre communauté. Il ne s'agira pas de nous défendre en affirmant que nous ne sommes pas plus responsables du crime commis par le gang des barbares parfaitement mixte racialement que l'ensemble des Français de souche dont certains ont été embarqués dans cette atrocité.
La gauche radicale antiraciste va choisir une autre voie. Intimement et silencieusement convaincue que le gang des barbares nous représente, elle va chercher à prétendre qu'ils n'ont pas agi par antisémitisme, qu'il s'agit d'un crime crapuleux « monté en épingle » par les racistes et les islamophobes pour jeter l'opprobre sur notre communauté, alors qu'il faudrait plutôt chercher les raisons sociales qui expliqueraient « la » délinquance violente dans les quartiers populaires . Pour la gauche antiraciste radicale, l'explication purement « crapuleuse » permet de s'identifier comme soutiens paternalistes des « bonnes » victimes que nous devons être, celles qui tuent des Juifs pour les mêmes raisons qu'elles volent des polo Lacoste, à cause de la question sociale. Mais tous ces discours ne peuvent contrecarrer le réel dit par les accusés eux-même. Ils ont enlevé un jeune salariés qui touchait 1200 euros par mois parce qu'ils croyaient tellement au complot juif comme une évidence inquestionnable qu'ils étaient prêts à risquer des dizaines d'années de prison au nom de cette croyance. Une croyance absolument ordinaire dans l'histoire de France.
Ce récit soit-disant protecteur d'une partie de la gauche ne nous protégera évidemment de rien. Les islamophobes et les racistes ont le réel pour eux en ce qui concerne l'affaire elle-même. Il y a bien un crime principalement antisémite. Libre à eux d'en tirer un récit raciste et islamophobe puisque le récit soit-disant antagoniste se fonde sur le déni absurde. Ce double récit va influer sur les nôtres. Attaqués de manière extrêmement violente par le récit islamophobe , la majeure partie des militants actifs de notre communauté trouveront à ce moment un point d'ancrage et de défense apparente dans le déni de l'antisémitisme porté par la gauche. S'il n'y a pas eu d'antisémitisme, alors nous sommes tous innocents, reconnaître la dimension antisémite du crime serait se tirer une balle dans le pied. C'est au moment de l'affaire Halimi que, très massivement, nous commencerons à voir la lutte contre l'antisémitisme comme un danger mortel pour nous. Alors qu'il aurait été si simple et si protecteur de pouvoir penser autre chose : la montée de l'antisémitisme dans l'ensemble de la société française et le fait que notre communauté était lourdement impactée par ce fléau, notamment parce que les leaders politiques du renouveau antisémite français avaient une force de frappe immense, à commencer par la mouvance soralienne et conspirationniste en plein boom depuis le 11 septembre 2001.
Mais l'on ne fait jamais que ce que l'on peut faire dans un contexte historique donné. Youssouf Fofana, « chef » du « gang des Barbares », sera l'adhérent le plus fanatique du récit islamophobe sur le nouvel antisémitisme. A son procès puis dans les années qui suivront, il récréera son récit personnel. Le petit salaud pathétique qui ne s'est jamais occupé de sa famille, le jeune homme ultra-violent et absolument amoral qui pense uniquement à des plans pour devenir riche et utilise sans vergogne de très jeunes femmes pour appâter ses proies, se transforme brusquement en islamiste d'opérette tragique appelant au djihad et tournant de sa prison des vidéos pour appeler au meurtre des Juifs au nom de la lutte pour la Palestine. De manière extrêmement parlante, il adopte ce récit en 2009, au moment où Dieudonné fait fructifier son commerce antisémite au nom de la défense de la Palestine pour laquelle il n' a jamais rien fait, pas plus que Youssouf Fofana, Qui finira très logiquement par se lier, non pas avec les prisonniers « salafistes » de sa prison ( il est isolé et méprisé par ses co-détenus ), mais avec la sphère dieudonniste et notamment avec l'avocate Isabelle Coutant-Peyre. C'est l'époque où la sphère antisémite soralienne française entretient volontiers une image de défenseuse des musulmans et des issus de l'immigration musulmane, laquelle arrange les islamophobes qui parlent de Dieudonné comme d'un « quasi-islamiste » à cette époque là, alors qu'il est catholique et le revendique.
Cet écran de fumée brune conduira beaucoup d'entre nous à des errements politiques tragiques. Certains penseront pouvoir créer un pont avec les Français non musulmans en se liant avec Alain Soral, d'autres au contraire, voulant garder leurs convictions universalistes iront combattre l'antisémitisme aux côtés des islamophobes, ce qui revient dans les deux cas exactement au même échec, même si les premiers seront plus stigmatisés que les seconds. Dix sept ans après l'assassinat antisémite d'un jeune Juifs, motivé par des croyances antisémites bien français, le piège s'est refermé sur nous. Ce mois de janvier en est la parfaite illustration factuelle.
Il y a quelques jours, Dieudonné, l'homme qui a renouvelé l'antisémitisme français, popularisé les négationnistes historiques comme Robert Faurisson, rempli des milliers de soirées où l'on dansait en ricanant sur les victimes de la Shoah a obtenu le pardon . Qu'il a demandé sur le site « Israël Magasine », dont il eu la bénédiction par l'intermédiaire de Francis Lalanne, grande figure du conspirationnisme franchouillard. Sa demande de «pardon », mise en scène grotesque à relents chrétiens lui a permis d'avoir les honneurs de TPMP ou sa lettre a été lue avec délices . Mais aussi ceux du Parisien et d'une dépêche de presse. Pour rappel, Dieudonné s'est servi de l'assassinat d'Ilan Halimi pendant toutes les années 2010, faisant de Youssouf Fofana la figure de l'innocent condamné par la puissance du lobby juif, notamment dans des vidéos où il appelle à sa libération en alternant avec des sorties pro-négationnistes. Il est également allé jusqu'à fantasmer publiquement la profanation du cadavre d'Ilan en s'adressant à la mère de celui-ci. Ceci n'a pas empêché qu'en ce mois de janvier 2023, la sphère politique et médiatique éprouve le besoin de s'interroger sur la « sincérité » de sa demande d'absolution.
Dans le même temps, Hassan Iquioussen, imam, faisait de la prison puis était interné, en centre de rétention puis expulsé. Pour quelques propos tenus pour certains il y a vingt ans. Et pour avoir en quelques occasions côtoyé Alain Soral et Dieudonné le pardonné. Hassan Iquioussen qui n'est pas chrétien a dit sobrement qu'il ne pensait plus une partie des propos qu'il avait tenus il y a quinze ans. Ceci n'a soulevé l'attention de personne à part des islamophobes répétant « Taqya », comme à chaque fois qu'un musulman parle. Cette situation est le fruit de la réécriture des faits. L'assassinat d'Ilan Halimi est généralement considéré comme le crime antisémite fondateur d'une période atrocement sanglante. Mais dans l'imaginaire actuel, ce crime antisémite ouvrant une période terrible a été commis au nom de l'islam ... ou assimilés. La réalité, à savoir qu'il l'a été par des jeunes gens convaincus intimement du préjugé antisémite partagé aujourd'hui par des millions de gens en France, ce dont attestent non seulement des études d'opinion mais aussi l'adhésion massive aux thèses conspirationnistes, a été totalement effacée des mémoires.
Pour l'avenir, elle ne doit pas quitter la nôtre. Non pas parce que nous aurions le devoir d'être meilleurs que tout le monde et de lutter contre l'antisémitisme. Face à la théorie du « nouvel antisémitisme », nous n'avons rien à prouver de plus que n'importe quels autres habitants non-Juifs de ce pays, nous avons le droit à l'indifférence comme les autres, si bon nous semble. A personne d'autre qu'aux musulmans, on ne demande de compte sur leur niveau de connaissance de l'histoire de la Shoah et s'ils commémorent ou non les crimes antisémites. Mais nous devons garder la mémoire de l'antisémitisme français des années 2000 et 2010 parce qu'il ne nous a pas épargnés. Il a contaminé notre communauté, notamment nos jeunes et sans même parler des assassinats et des violences commises, qui n'ont été le fait que de quelques-uns, il a conduit toute une génération dans l'écueil de la soumission aux thèses de l'extrême-droite française. Il a laissé faible, démunie et incapable de lutter efficacement contre l'islamophobie des milliers de jeunes qui se percevaient pourtant comme des défenseurs de leur communauté. Mieux formés, ils auraient pu se solidariser avec un jeune homme pas très différent d'eux, qui avait la même condition sociale et qui a été assassiné parce que l'antisémitisme en avait fait le membre d'une Confrérie très puissante et maléfique qui avait envahi la France. Aujourd'hui dans l'imaginaire dominant, en parallèle avec ce recit-là, il y a une autre Confrérie fantasmée, la nôtre.